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Pleins feux sur les chercheurs

Entrevue avec Aaron Jones : l’utilisation des données couplées de l’ÉLCV | Le mode de paiement des soins à domicile a-t-il une incidence sur notre santé personnelle et les résultats des services de santé?

Grâce à une collaboration entre l’Étude longitudinale canadienne sur le vieillissement (ÉLCV) et le Réseau de recherche sur les données de santé du Canada (RRDS Canada) , les chercheuses et chercheurs peuvent accéder au couplage des données de la cohorte de l’ÉLCV avec celles des centres provinciaux de données administratives sur la santé du pays, afin d’explorer le croisement entre le vieillissement et l’utilisation des soins. 

L’ÉLCV a interviewé Aaron Jones, professeur adjoint au Département des méthodes, des preuves et de l’impact de la recherche en santé à l’Université McMaster, au sujet de son étude (en anglais), qui favorise un couplage novateur entre l’ÉLCV et les centres de données provinciaux afin d’examiner le rôle de la source de paiement des soins à domicile sur les résultats des services de santé en Ontario 

Quel est votre intérêt envers les soins à domicile et pourquoi est-il essentiel de les évaluer avec le vieillissement? 

La population du Canada est vieillissante, et de nombreux Canadiens souhaitent rester chez eux le plus longtemps possible. Ce désir peut devenir difficile à combler lorsque des besoins de santé surgissent et qu’il devient plus difficile d’accomplir les tâches ménagères quotidiennes. C’est là où les soins à domicile jouent un rôle fondamental, car ils permettent aux adultes âgés de vieillir à l’endroit qu’ils privilégient. 

Pourquoi le financement des soins à domicile varie-t-il selon les provinces et quelles en sont les conséquences? 

Les soins à domicile ne font pas partie de la Loi canadienne sur la santé comme les services médicaux et hospitaliers, ce qui entraîne plus de variations quant à leur mode de financement et à leur prestation. Toutes les provinces offrent des services de soins à domicile financés par le gouvernement, mais l’expérience de la personne qui les reçoit varie selon la province. D’après le lieu de résidence, il y a des différences à l’égard de l’admissibilité de cette personne aux services, du nombre d’heures de soins auxquelles elle est admissible et de son obligation de payer une partie ou la totalité des soins. De plus, à cause de la manière dont les soins à domicile sont considérés en vertu de la Loi canadienne sur la santé, il y a un fort marché pour les services privés de soins à domicile. On sait que de nombreux besoins de soins à domicile ne sont pas satisfaits chez les adultes canadiens âgés et que l’achat de soins privés peut représenter la seule solution, mais ce n’est pas tout le monde qui en a les moyens.

Qu’est-ce que les données administratives sur la santé? 

Les données administratives sur la santé sont recueillies systématiquement dans le cadre du fonctionnement normal du système de santé. Pratiquement chaque interaction avec le système de santé est enregistrée et peut être dépersonnalisée pour être utilisée en recherche. Il peut s’agir des visites au médecin, des hospitalisations, des consultations à l’urgence ou des soins à domicile, pourvu qu’ils aient été financés par le gouvernement. Les données administratives du système de santé ont de nombreux avantages, parce qu’elles contiennent de l’information exacte sur pratiquement la totalité des habitantes et habitants de chaque province. Elles peuvent toutefois être difficiles à utiliser, parce qu’elles ne sont pas recueillies pour la recherche et que des données importantes auxquelles les chercheuses et chercheurs aimeraient avoir accès ne sont parfois pas disponibles. . 

En termes simples, quelles recherches réalisez-vous et qu’espérez-vous apprendre? 

Mon équipe de recherche et moi cherchons à comprendre combien de participantes et participants à l’ÉLCV reçoivent des soins à domicile publics ou privés et à décrire les différences entre les personnes qui ont accès à des soins privés, des soins publics ou les deux types de soins. Nous aimerions aussi comprendre en quoi l’utilisation des soins à domicile publics et privés influe sur l’utilisation du système de santé dans le futur, telle que les hospitalisations, les consultations à l’urgence ou les admissions en établissement de soins de longue durée.  

En quoi l’étude profite-t-elle du couplage des données de l’ÉLCV avec les données administratives provinciales de santé pour atteindre ses objectifs?  

Les bases de données administratives sur la santé détiennent d’excellents dossiers sur l’utilisation des soins à domicile publics, mais ne possèdent pas de données sur les soins à domicile privés. En couplant les données de l’ÉLCV avec les données administratives sur la santé, nous pouvons combiner l’une des seules sources de données sur l’utilisation des soins à domicile privés au Canada à des données de référence détaillées sur les résultats du système de santé.  

Anticipez-vous de mener ces recherches à l’aide des données administratives sur la santé d’autres provinces? 

Si nous disposons du financement nécessaire, nous aimerions pouvoir le faire. Les variations du système de santé d’une province à l’autre sont souvent perçues comme négatives, mais je pense que nous devons aussi les percevoir comme une occasion. C’est une expérience naturelle dont nous pouvons tirer profit pour en apprendre davantage sur les effets des soins à domicile sur les résultats cliniques de nos patientes et patients.  

En quoi les résultats de cette étude éclaireront-ils les stratégies, la planification des capacités et les décisions de financement pour soutenir les systèmes de soins à domicile? 

De meilleures données sur le degré d’utilisation des soins à domicile publics et privés et sur les personnes qui les utilisent peuvent faire ressortir les problèmes de capacité et de financement du secteur. Les ressources affectées aux soins à domicile sont limitées, et les provinces doivent prendre des décisions cruciales sur la meilleure façon d’affecter les soins disponibles. Les données probantes que nous produirons sur le lien entre les soins à domicile et les autres utilisations du système de santé contribueront à éclairer ces décisions, y compris le meilleur financement pour l’ensemble du secteur. 

Aaron Jones
 Professeur adjoint, Département des méthodes, des preuves et de l’impact de la recherche en santé, Université McMaster  

Aaron Jones est professeur adjoint, directeur du site d’ICES McMaster et directeur de recherche à l’École de médecine Michael G. DeGroote de l’Université McMaster, campus régional de Waterloo. Titulaire de la chaire de recherche Schlegel en épidémiologie clinique et en vieillissement, c’est un chercheur en services de santé et un biostatisticien spécialisé dans l’utilisation des données administratives sur la santé et les méthodologies scientifiques des données. Son programme de recherche est axé sur l’utilisation des services de santé par les adultes âgés qui ont besoin de soins continus, afin d’établir la façon de mieux organiser, gérer et offrir les soins dont ils ont besoin pour bien vieillir dans le lieu de leur choix. Ses travaux sont financés par les Instituts de recherche en santé du Canada et la Société Alzheimer du Canada.