Une étude de l’Université York démontre que les femmes travaillant par quarts sont particulièrement susceptibles à recevoir un diagnostic de fragilité

Monday, Mars 20, 2023

TORONTO —  Une nouvelle étude menée par des scientifiques de l’Université York a établi un lien entre le travail par quarts et la fragilité chez les travailleur×ses d’âge moyen et plus âgé×es au Canada, en particulier chez les femmes travaillant par quarts rotatifs.

« Nous ne pouvons pas ignorer les problèmes de santé associés au travail par quarts, notamment les maladies cardiovasculaires, le diabète, les accidents vasculaires cérébraux et certains cancers », partage Durdana Khan, étudiante au doctorat à la Faculté des sciences de la santé de l’Université York et stagiaire au York Centre for Aging and Research and Education. « Notre étude est la première à examiner le lien entre le travail par quarts et la fragilité chez les adultes d’âge moyen et plus âgés. »

L’étude, réalisée en collaboration avec les professeur·es Heather Edgell, Hala Tamim et Michael Rotondi de l’Université York et l’immunologiste et épidémiologiste Chris Verschoor du Health Sciences North Research Institute, sera publiée dans le numéro de mai de la revue Journal of Occupational and Environmental Medicine. Mme Khan et ses collègues ont examiné les données de 48 000 participant×es à l’Étude longitudinale canadienne sur le vieillissement de partout au Canada qui ont notamment pris part à un suivi après trois ans permettant de mesurer la fragilité.


Durdana Khan, doctorante à la Faculté des sciences de la santé

Nous définissons la fragilité comme la probabilité de tomber malade et de mourir. Les scientifiques utilisent un indice qui rassemble 52 facteurs susceptibles de réduire la durée de vie, notamment la dépression, l’arthrose, les antécédents de crise cardiaque et les problèmes de mobilité. Les personnes avec une légère fragilité sont considérées comme celles qui présentent au moins cinq facteurs, alors que présenter au moins 11 facteurs correspond à la catégorie « très fragile ».

L’étude a révélé qu’un adulte canadien sur cinq travaille par quarts, c’est-à-dire un travail qui ne correspond pas à un horaire de neuf à cinq. La probabilité de présenter une fragilité était plus élevée pour les personnes ayant des antécédents de travail par quarts en comparaison avec les personnes qui n’ont travaillé que de jour. Plus d’une personne sur quatre s’est avérée légèrement fragile et 7 % des personnes étaient quant à elles très fragiles. Les femmes dont l’emploi le plus long consistait en un travail par quarts rotatifs étaient particulièrement susceptibles d’être considérées comme fragiles. Plus de 31 % d’entre elles appartenaient à la catégorie légèrement fragile et près de 11 % d’entre elles étaient classées comme étant très fragiles.

Les rythmes circadiens sont modérés par l’exposition au soleil. L’entrée de la lumière du soleil dans les yeux envoie des signaux à la glande pinéale logée dans le cerveau. Cette stimulation entraîne la sécrétion d’hormones et le déclenchement de réponses qui régulent la vigilance, l’humeur et l’appétit, alors qu’un manque de lumière déclenche des réponses différentes. Chez les personnes qui travaillent par quarts, ce processus est dérégulé et la recherche suggère que cette perturbation pourrait contribuer à une multitude de problèmes de santé.


Professeure Heather Edgell

« Bien que ces résultats soient préliminaires, ils indiquent que la perturbation circadienne peut jouer un rôle important dans la fragilité, ce qui justifie l’utilité d’une enquête plus approfondie », affirme Mme Khan.

Cette nouvelle étude s’appuie sur des recherches antérieures menées par Mme Khan et la professeure Edgell qui suggérait qu’un lien pouvait exister entre le travail par quarts et la ménopause tardive.

« Le rythme circadien influence la capacité du cerveau à contrôler la sécrétion d’hormones, ce qui peut influencer la ménopause », explique la professeure Edgell. « Par conséquent, beaucoup de changements physiologiques peuvent survenir en raison du travail par quarts. »

Bien que les femmes soient plus susceptibles d’être fragiles, la recherche démontre dans l’ensemble qu’elles sont plus résistantes à la maladie que les hommes. Ainsi, la présente étude ne suggère pas nécessairement une mortalité plus élevée. Cela dit, elle met en évidence des différences fondées sur le sexe qu’il serait important de prendre en compte, car de plus en plus de femmes travaillent en dehors d’un horaire de neuf à cinq selon Mme Khan, qui ajoute que faire de l’exercice et avoir une bonne alimentation peuvent aider à combattre certains des effets néfastes.

« Nous ne pouvons pas faire disparaître le travail par quarts, mais nous pouvons renverser la fragilité dans une certaine mesure », conclut-elle.

Cet article a d’abord été publié par l’Université York. Consultez l’article original ici (en anglais).